Un exemple de notre savoir-faire en matière d’adaptation au changement climatique Comment aménager et construire un espace public de 12 hectares en bord de mer, en l’adaptant au risque de submersion marine? Telle était la problématique confiée à setec par la Ville de Cherbourg-en-Cotentin, ainsi qu’à l’agence d’architectes et paysagistes, « Les Marneurs ». Emblématique de notre démarche « Ingénieurs & Citoyens », cette étude fait figure de cas d’école, qui pourrait servir pour d’autres littoraux.

 

 

Céline Azaïs, urbaniste programmiste et cheffe de projet chez setec organisation, a piloté l’étude. Elle nous apporte son éclairage sur le projet.     Un emplacement stratégique « Jusqu’à maintenant, Cherbourg, ville de pêcheurs, s’est urbanisée dos à la mer. Aujourd’hui, changement de paradigme, la ville souhaite reconquérir le quai Lawton-Collins en portant un aménagement résilient, adapté à l’élévation du niveau des océans », explique Céline. Ce vaste espace est situé à l’interface entre le port de commerce et le centre-ville de Cherbourg, donc un emplacement très stratégique et chargé d’histoire, qui accueillait autrefois les chantiers navals et une gare transatlantique.

C’est aussi un des seuls endroits de Cherbourg offrant un accès à la mer. Aujourd’hui peu valorisé, le quai est occupé par le port de pêche, les anciennes douanes, un parking et quelques friches, et un équipement touristique rayonnant, la Cité de la Mer. Les équipes de setec ont mené une étude sur les usages et besoins du quartier, auprès des utilisateurs du quai et des conseils de quartier.

Tous les usages conjugués « Nous avons proposé plusieurs usages pour le nouveau quartier, tous adaptés aux besoins des riverains et des pêcheurs », souligne Céline, « Les riverains du port demandaient un lieu où se promener en contemplant la mer. La Ville demandait une valorisation culturelle de la cale des anciens chantiers navals. Nous devions aussi laisser le « bord à quai » disponible pour les pêcheurs. Nous avons conjugué tous les usages dans notre programmation du quartier ». Le programme de 120 logements et l’hôtel est réparti en quatre îlots. Ensuite viennent les activités culturelles et festives autour d’un parvis, puis les jardins marins avec des guinguettes saisonnières démontables. La pointe est consacrée à la contemplation de l’horizon marin.

Faire face à toutes les contraintes Toutes les prévisions liées au réchauffement climatique indiquent une montée du niveau marin, l’ampleur et la fréquence des submersions marines pourraient ainsi augmenter. « Ce quartier comporte de réelles contraintes », souligne Céline, « à commencer par le Plan de Prévention des Risques Littoraux, qui interdit les constructions à de nombreux endroits. Par ailleurs l’ancienne gare transatlantique est inscrite aux Monuments Historiques… Et également, selon les prévisions du GIEC, à l’horizon 2100, tout le quai pourrait être inondé. Nous avons donc conçu les bâtiments de façon à les adapter à ce risque, en prenant en compte dans notre programme plusieurs hypothèses, dont une de plus d’un mètre d’élévation du niveau marin d’ici 2100 ».

Une stratégie graduelle face à la submersion Lors d’une tempête centennale, la Manche pourrait recouvrir à hauteur de 50 cm, une partie du terre-plein portuaire abritant la Cité de la Mer. « Même après l’élévation du niveau de la mer d’1m, la submersion du quai est un phénomène temporaire liée à la marée et aux tempêtes. Les épisodes de submersion pourraient arriver environ deux fois par an à partir de 2070 », précise Pierre Peters, expert en hydrologie maritime d’hydratec. Les quais seront ainsi complètement submergés, puis la mer se retirera lentement. « Il s’agit d’un phénomène comparable à celui des grandes marées à Venise. Pour y faire face, nous avons adopté une stratégie graduelle… ». Pour faire face à une augmentation du niveau marin de 60 cm, une partie du quai sera donc surélevée.

Par ailleurs, en cas d’épisode climatique, l’eau pourrait atteindre le rez-de-chaussée et la voirie. Les habitants du programme immobilier, disposeront d’un réseau de passerelles placé à R+1. Aucun logement n’est prévu en rez-de-chaussée. Le quartier est adapté pour redevenir très rapidement fonctionnel après une submersion marine.

Adapter plutôt que résister « L’eau finit toujours par monter au-delà des dispositifs. Avec ce projet, nous avons commencé à amorcer une culture du risque. Cette culture consiste à apprendre à s’adapter à l’eau plutôt que chercher à résister », estime Céline. « Elle s’élabore dans le temps, en apprenant à prendre en compte le risque et ses impacts. Nous avons commencé par sensibiliser les services techniques et les élus. La ville s’est saisie de ce sujet, pour le transmettre aux habitants ».

La synergie au sein du groupe setec Ce projet est aussi exemplaire de la synergie dans le groupe setec. setec organisation était mandataire du groupement pour le volet programmation urbaine, montage opérationnel et financier. setec hydratec a géré le volet pollution, sous la houlette de Jacques Pouilhe, et modélisé le phénomène de submersion en intégrant le projet. « Le modèle a confirmé sa fiabilité. Lorsque le terre-plein portuaire est submergé, les espaces publics et en particulier les jardins, guident la circulation de l’eau lorsqu’elle se retire… » explique Céline. Laurent Berger, setec tpi, (VRD, chiffrage des aménagements et évaluation des surcoûts liés à la résilience), et Lionel Bertrand, setec international, (mobilité) ont apporté leur expertise au projet.